L’alcool et la santé mentale : politiques et pratiques en Angleterre
RÉSUMÉ
De nombreuses personnes qui abusent de l’alcool ont également des problèmes de santé mentale, et de nombreuses personnes ayant des problèmes de santé mentale abusent également de l’alcool. Pourtant, peu d’entre eux obtiennent une aide efficace des services de lutte contre l’alcool ou de santé mentale. Les politiques nationales relatives à l’alcool font peu référence à la santé mentale, tandis que les politiques nationales de santé mentale accordent peu d’importance à l’alcool. Les documents d’orientation pour les deux recommandent une aide intégrée pour les personnes ayant des difficultés concomitantes, mais il n’y a pas d’incitation forte à mettre en œuvre cette approche dans la pratique. L’Institut d’études sur l’alcool et le Centre de santé mentale ont interrogé conjointement des personnes travaillant dans les services de lutte contre l’alcoolisme et de santé mentale afin de comprendre les offres actuelles et les obstacles à une aide efficace. Nous avons également co-organisé un séminaire pour les experts des deux domaines et examiné les politiques et les directives actuelles dans chacun d’eux. Notre enquête a révélé que la plupart du personnel, tant dans les services d’alcoolisme que de santé mentale, estimait que le soutien aux personnes atteintes de maladies concomitantes était insuffisant. Le soutien aux sans-abri a toujours été le principal sujet de préoccupation. Notre enquête a également révélé que la confiance et la compréhension entre l’alcool et les services de santé mentale étaient faibles. Cependant, le personnel des services de lutte contre l’alcoolisme était globalement plus critique à l’égard des services de santé mentale que l’inverse. Les obstacles à une plus grande intégration comprenaient le financement et les pénuries de main-d’œuvre (en particulier dans les services de lutte contre l’alcoolisme en raison du manque de formation) et la stigmatisation à laquelle sont confrontées les personnes atteintes de maladies concomitantes. Ces conclusions ont été reprises lors du séminaire. L’amélioration du soutien aux personnes atteintes d’affections concomitantes nécessitera des actions à tous les niveaux, de la politique nationale à la prestation de services locaux. Il faut une action concertée dans la mesure du possible pour prévenir les problèmes concomitants, ainsi que des efforts continus pour lutter contre les attitudes stigmatisantes et renforcer la capacité du personnel des deux services à identifier et à répondre plus efficacement aux besoins des personnes.
Nous recommandons : Le gouvernement britannique élabore de toute urgence une stratégie globale en matière d’alcool et s’engage, aux côtés du NHS England, à adopter une deuxième vision prospective quinquennale pour la santé mentale. La stratégie de lutte contre l’alcool devrait inclure à la fois des mesures au niveau de la population pour lutter contre les méfaits de l’alcool (y compris en ce qui concerne les prix, la commercialisation et l’octroi de licences) et des mesures au niveau des services pour garantir que davantage de personnes bénéficient d’une aide conjointe efficace. La stratégie devrait inclure des engagements spécifiques concernant le rôle de l’alcool dans les problèmes de santé mentale et les difficultés rencontrées par les personnes souffrant de comorbidités. La vision prospective quinquennale pour la santé mentale devrait inclure des mesures visant à aborder les liens entre l’alcool et la santé mentale, y compris l’accès à une aide efficace pour les personnes atteintes de maladies concomitantes.
Ce rapport a également formulé d’autres recommandations relatives à des aspects précis des politiques et des pratiques en matière de santé mentale et d’alcool. Ces recommandations devraient être mises en œuvre d’urgence et la poursuite des actions à cet égard devrait être couverte par la stratégie sur l’alcool et la vision prospective sur cinq ans dont il a été question précédemment :
► Le ministère de la Santé et des Affaires sociales, le NHS England et Public Health England devraient examiner de toute urgence le financement des services de toxicomanie et la fourniture d’un soutien aux personnes atteintes de problèmes de santé mentale concomitants.
► Durabilité et transformation : Les partenariats et les systèmes de soins intégrés émergents devraient élaborer des plans pour améliorer le soutien aux personnes ayant des problèmes concomitants de santé mentale et d’alcool. Ceux-ci devraient réunir les commissaires et les fournisseurs de services pertinents et ceux qui les utilisent afin de convenir de plans de développement d’un soutien intégré.
► Les plans locaux de prévention du suicide devraient inclure des mesures visant à s’attaquer aux liens entre l’abus d’alcool, l’automutilation délibérée et les décès par suicide.
► Health Education England devrait veiller à ce que tous les psychiatres stagiaires reçoivent une formation et effectuent des stages dans les services de toxicomanie (qui pourraient inclure ceux du secteur bénévole).
► Les services de liaison avec l’alcool dans les hôpitaux généraux devraient chercher à identifier les personnes qui abusent de l’alcool et à les orienter vers le soutien approprié des services locaux.
► Le programme d’amélioration de l’accès aux thérapies psychologiques (IAPT) à l’échelle nationale, et les GCC dans les zones locales, devraient veiller à ce que les personnes souffrant de difficultés concomitantes liées à l’alcool ne soient pas exclues des services de thérapie psychologique.
► Le ministère de la Santé et des Affaires sociales et Public Health England devraient commander une campagne nationale de lutte contre la stigmatisation pour dissiper les mythes sur les personnes ayant des problèmes concomitants, y compris un travail spécifique pour s’attaquer aux attitudes et au comportement des professionnels, parallèlement à un travail ciblant l’opinion publique plus largement. Cela devrait être combiné avec des efforts visant à réduire la « normalisation » de l’alcool en tant que forme d’automédication pour faire face au stress et à la détresse.
► Les bailleurs de fonds de la recherche devraient commander une analyse économique des coûts de la comorbidité de l’alcool et des problèmes de santé mentale. Il devrait s’agir notamment d’une analyse de la manière dont l’argent public est dépensé et de la manière dont cela pourrait être amélioré.