Morbidité et mortalité chez les sans-abri, les prisonniers, les travailleurs du sexe et les personnes atteintes de troubles liés à la consommation d’alcool ou d’autres drogues dans les pays à revenu élevé
Résumé
Fond
La santé de l’inclusion met l’accent sur les personnes en très mauvaise santé en raison de la pauvreté, de la marginalisation et de la multimorbidité. Nous voulions examiner les données sur la morbidité et la mortalité sur quatre populations qui se chevauchent et qui connaissent une exclusion sociale considérable : les populations de sans-abri, les personnes atteintes de troubles liés à la consommation d’alcool et d’autres drogues, les travailleuses du sexe et les personnes emprisonnées.
Méthodes
Pour cette revue systématique et cette méta-analyse, nous avons recherché MEDLINE, Embase et la Bibliothèque Cochrane pour des études publiées entre le 1er janvier 2005 et le 1er octobre 2015. Nous n’avons inclus que des revues systématiques, des méta-analyses, des études interventionnelles et des études observationnelles qui avaient des résultats en matière de morbidité et de mortalité, qui ont été publiées en anglais, dans des pays à revenu élevé, et qui ont été effectuées dans des populations ayant des antécédents d’itinérance, d’emprisonnement, de travail du sexe ou de trouble de consommation d’alcool (à l’exclusion de la consommation de cannabis et d’alcool). Les études portant uniquement sur les résultats périnatals et les études portant sur des personnes atteintes d’un état de santé particulier ou recrutées dans des unités hospitalière de soins intensifs ou à forte dépendance ont été exclues. Nous avons examiné des études à l’aide d’un logiciel d’examen systématique et extrait des données de rapports publiés. Les principaux résultats ont été les mesures de la morbidité (prévalence ou incidence) et de la mortalité (taux de mortalité standardisés et taux de mortalité). Les estimations sommaires ont été calculées à l’aide d’un modèle d’effets aléatoires.
Résultats
Notre recherche a permis d’identifier 7946 articles, dont 337 études ont été incluses pour analyse. Les taux de mortalité standardisés toutes causes confondues ont été considérablement augmentés dans 91 (99 %) de 92 points de données extraits et étaient 11·86 (IC de 95% 10·42-13·30 ; I2=94·1%) chez les individus femelles et 7·88 (7·03-8·74; I2=99·1%) chez les hommes. Les estimations sommaires du SMR pour les catégories internationales de classification des maladies avec deux points de données inclus ou plus étaient les plus élevées pour les décès dus à des blessures, empoisonnements et autres causes externes, chez les deux hommes (7·89; IC 95% 6·40-9·37; I2=98·1%) et les femmes (18·72; 13·73-23·71; I2=91·5%). La prévalence de la maladie a été constamment élevée dans les catégories suivantes : infections (p. ex., la prévalence la plus élevée signalée était de 90 % pour l’hépatite C, de 67 [65 %] de 103 personnes pour l’hépatite B, et 133 [51 %] des 263 personnes atteintes d’infection tuberculeuse latente), de santé mentale (p. ex., la plus élevée signalée était de 9 [4 %] de 227 personnes atteintes de schizophrénie), de maladies cardiovasculaires (par exemple, la plus élevée signalée était de 32 [13 %] de 247 personnes atteintes de maladie coronarienne) et de troubles respiratoires (par exemple, le taux le plus élevé signalé était de 9 [26 %] de 35 personnes asthmatiques).
Interprétation
Notre étude montre que les populations de sans-abri, les personnes atteintes de troubles liés à la consommation d’alcool et d’autres drogues, les travailleuses du sexe et les personnes emprisonnées éprouvent des inégalités extrêmes en matière de santé dans un large éventail de conditions de santé, l’effet relatif de l’exclusion étant plus important chez les femmes que chez les hommes. L’hétérogénéité élevée entre les études devrait être explorée davantage en utilisant l’amélioration de la collecte de données dans les sous-groupes de population. L’inégalité extrême en matière de santé identifiée exige une politique et des services interse sectoriels intensifs pour prévenir l’exclusion et améliorer les résultats sanitaires chez les personnes déjà marginalisées.